Essai de chronologie

1949 – 1964

Denis Godefroy naît à Évreux, le 19 août 1949, fils de Christiane Renaux (née en 1926) et de Pierre Godefroy (né en 1920). Il est l’aîné de cinq enfants. Son père est peintre en lettres décoratives et possède un atelier au 47, boulevard de du Jardin l’évêque à Évreux. Peintre et mélomane, il peint pour son plaisir et initie Denis, dès son plus jeune âge, au dessin, aux techniques picturales. De cet apprentissage, Denis Godefroy garde le souvenir de l’atelier de son père, de la préparation de ses fonds à la peinture Levi ; il garde l’amour des couches que Pierre Godefroy aimait passer, préparer, du ponçage, de l’odeur de térébenthine et des pastilles Zan Blackoïd !

« Je suis un ancien petit enfant. J’aurais bien aimé garder la fraîcheur du regard de ma petite enfance. J’ai gardé dans mes yeux les peintures que mon père faisait et je me souviens très bien de l’odeur de son atelier et du silence des expositions qu’il me faisait visiter.

C’est de toutes ces empreintes conscientes et inconscientes que petit à petit mon travail s’est nourri. Exposer dans une école par exemple c’est faire de nouveau ce voyage à l’envers et prendre pour soi-même les leçons des petits. » D.G.

Les vacances se passent sur la côte normande, à Jullouville, Saint Pair sur mer, Carolles et Saint-Jean le Thomas, cités balnéaires proches de Granville, lieux auxquels Denis Godefroy restera attaché et qui inspireront sa peinture.

 

 

1965

Élève de Desgranges, professeur de dessin au Lycée d’État d’Évreux, Denis pense au professorat et prépare l’école Claude Bernard. Il lit avec passion de la poésie et de la philosophie.

 

1966

Première exposition à dix-sept ans, au 19, rue Charles Corbeau à Évreux, avec Jean Pierre Morin élève à l’école Boulle. Il expose cinq années de travail : aquarelles, huile, lavis et fusains. L’œuvre est figurative et une des toiles « fleurs d’automne » est remarquée pour le bleu qui habitera largement sa peinture.

« Quand j’étais enfant je n’aimais que le rouge. Je pensais que le bleu était une couleur servile. Je me suis toujours posé la question de savoir quel type de rapport j’entretiens avec le bleu. Ce qui m’intéresse dans les couleurs, c’est leur impact musical. » D.G.

Il découvre les eaux-fortes de Goya, et les œuvres de graveurs qui l’influenceront.

 

1968

Denis Godefroy affirme son goût pour la littérature et la musique et crée avec ses frères et ses amis le groupe Anathème.

« Ce n’est pas à l’homme que nous jetons l’anathème mais à l’oubli. Pour que tout un passé enfoui dans l’inconscient surgisse à la surface du silence. Il est des moments ou se taire est le prélude d’une perdition. » D.G.

Le groupe Anathème propose un spectacle « Ecce Homo » mêlant poésie et musique à la maison de l’Europe à Évreux.

 

1969

Mariage avec Martine Dionis.

Denis Godefroy est surveillant au Collège d’Enseignement Technique du Bâtiment d’Évreux qui lui passe commande de 18 panneaux.

Le groupe Anathème monte le spectacle « L’un dans l’autre », titre emprunté au poète André Breton, sur des textes d’Allen Ginsberg et autres poètes de la beat generation « pour nous sortir de notre léthargie » D.G.

 

1970

Il expose dans l’ancien musée d’Évreux avec Pascal Pingault en mai, puis à la galerie Loeffer, 4, rue des écoliers à Évreux en octobre. Il expose également aux Sables d’Olonne.

« Le secret de l’art est de corriger la nature disait Voltaire ; je souhaite desservir la beauté au sens classique du terme au profit de la violence du trait. » D.G.

 

1971

Exposition de peintres et de photographes « Tortures » à l’ancien musée d’Évreux où il présente 15 toiles et autant de dessins. Le groupe Anathème ouvre l’exposition avec un spectacle pour percussions, piano et voix sur des textes d’Antonin Artaud.

 

1972

Naissance son fils Thibault.

Accompagné du philosophe Michel Servière, il participe à l’exposition « Lumières de la main » à la galerie d’avant-garde Cécile Gaillot, 156, rue Eau de Robec à Rouen. Dix-huit artistes sont rassemblés parmi lesquels Zack, Soulages, Ivkovic. Il parle de l’influence de Jackson Pollock et de la peinture américaine et avoue son admiration pour Nicolas de Staël. Les usines Jeulin dirigées par M. Casals, mécène, lui commandent deux panneaux sur le thème « Mouvement, envol et dynamisme ».

 

1973

Il participe au 7e festival d’art actuel à Rouen dans une exposition intitulée « Paysages coincés ».

« Godefroy peint, peint les paysages, des paysages coincés comme il les appelle. L’horizon de ses paysages est plus ou moins haut, la rencontre du ciel et de la terre plus ou moins nette. À leur intersection il se passe bien des choses. (…)

Nous relèverons que Godefroy s’oriente de plus en plus vers le figuratif que les titres de ses toiles Paysages coincé sans oxygène, Mouettes, accentuent, figuration que l’on pourrait appeler minimale ou, pourquoi pas, puisque l’épithète revient symptomatiquement chez lui « Coincée » Deux médiums à cet effet ; la traditionnelle peinture à l’huile et la peinture glycérophtalique, lisse, brillante. Le travail autrefois inspiré des pâtes écrasées de Nicolas de Staël puis devenu plus gestuel se concentre tout en couleur. Tout se passe comme si d’un Bazaine ou d’un Pignon avait été retenu : la peinture est incarnation et quête du réel. »

Michel Servière in « Valeurs de Rouen », n°2, 1973.

 

Dix-septième salon de l’Union des Arts plastiques à Saint Étienne du Rouvray avec Georges Breuil. L’exposition à la galerie de l’Estuaire, dirigée par Yvon Gay à Honfleur, inaugure la série des oiseaux.

 

1974

Huitième festival d’Art Actuel de Rouen où il expose aux côtés de Daniel Authouart.

« L’art dans l’entreprise » avec Jean-Claude Pinchon, Tony Fritz-Vilar, Pierre Godefroy, Christian Sauvé. Exposition à la galerie librairie l’Armitière Création de l’Arlequin, ateliers pour enfants et adultes, 13 rue de l’École à Rouen.

 

1975

Denis Godefroy expose Altérations à la galerie L’Estuaire, à Honfleur. La photo fait partie intégrante de son œuvre.

« Le squelette de l’oiseau n’est qu’une représentation mythique de la crucifixion du Christ » D.G.

 

Les nus visibles dans Altérations sont ligotés. Les Autoportraits sont d’une grande violence. Marqué par les écrits de Ulrike Meinhoff, membre de la Bande à Baader et par son parcours, il n’hésite pas à y faire référence.

« Peindre est un acte politique et engagé ». D.G.

 

Ses œuvres sont exposées à la FIAC (foire internationale d’art contemporain) à Paris. Invité par Dany Bloch, directrice de l’espace d’arts plastiques, il expose ses œuvres sur du papier à Villepariris, à la foire de l’Estampe et du Multiple.

 

1976

Denis Godefroy expose Boîtes à ARC 2, « L’objet comme œuvre d’art », dans le cadre de l’exposition organisée par le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris et la Maison de la Culture de Rennes. Il expose au Grand Palais dans le cadre du salon « Grands et Jeunes d’aujourd’hui ».

À cette époque, Godefroy rencontre l’écrivain Denis Roche qui vient de publier le roman « Louve Basse » (Edition du Seuil, collection « Fiction et Cie »).

À Rouen, il décide, avec des musiciens et plasticiens dont son ami Jean-Claude Thévenin de créer un spectacle « Fragments I, Itinéraire d’un corps » mêlant des extraits de « Louve Basse » et des textes d’Ulrike Meinhoff et de Bernard Govy.

La musique d’Alain Mabitt sert de support à une « Action paintaing ». Des extraits de ce spectacle ont été diffusés le 2 juin 1977 dans l’émission « Écoute » sur France Musique.

Cette même année, il est l’invité de Dany Bloch à l’Unesco, Paris. En octobre, il commence ses interventions hebdomadaires dans les ateliers d’expression mis en place à l’Hôpital de jour de la MGEN.

 

1978

De même, en avril, et ce pendant vingt ans, Denis Godefroy interviendra dans l’univers psychiatrique, une demi-journée par semaine, dans un atelier d’expression mis en place au Centre Hospitalier Psychiatrique du Rouvray à Sotteville les Rouen. Avec ses amis philosophes, peintres et sculpteurs et l’avocat Jean-Claude Ducable, l’artiste se lance dans l’ouverture d’une galerie associative, Déclinaisons, rue de l’École à Rouen. Il y expose ses Autoportraits.

À Paris, au salon de Mai, il côtoie Joël Kermarrec Le Poids de la peinture mais aussi Sonia Delaunay Rythme – Couleur, Hartung T 1971 H 19, Léon Zack Peintures 78 et Otto Teichert. Comme l’année précédente, il expose au Salon « Grands et Jeunes d’aujourd’hui ».

 

1979

« Grands et Jeunes d’aujourd’hui » l’accueille à nouveau avec Paroles blanches ; Petits paysages, série où des photographies d’inondation disparaissent, voilées par la peinture.

Il expose ensuite avec Alain Lambilliote, Lionel Godart et Guy Chaplain, à Rouen, à la galerie Déclinaisons.

 

1980

C’est l’explosion de la figuration libre. Il est présent à Paris au Salon de Mai, et à la galerie Déclinaisons. L’International Biennal Exhibition of Portraits (Yougoslavie) l’accueille.

 

1981

Godefroy ouvre son atelier au 67, rue Bouvreuil à Rouen. Il entre alors dans une période de changement. Son travail évolue vers une démarche plus abstraite. Il commence sa Série noire qu’il expose à la galerie Déclinaisons, Rouen.

« C’est un gris qui a les apparences du noir ».       

« Les figures nommables du réel sont absentes des toiles noires de Denis Godefroy, ce papier photographique encollé puis recouvert par la matière. De l’idée classique, il ne reste que l’encadrement. La sensation d’habiter un espace énigmatique. »

Extrait du texte d’Eric Vandecasteele, accompagnant l’exposition

 

1982

Sa série Minoirs est présentée dans le cadre de « Confrontations-Générations » à Tours. Cette exposition donne lieu à de multiples débats dans le cadre du colloque Art média.

Invité à nouveau par Dany Bloch à la foire de l’Estampe et du Multiple, il expose Série Noire, travaux sur papier, à Villeparisis.

Il participe à l’exposition « Citations critiques 1978-1982 », à la galerie Déclinaisons qui, cette même année organise avec le musée des Beaux-Arts de Rouen, l’exposition « Du livre », première exposition au niveau national, consacrée au livre d’artiste.

 

1983

Denis Godefroy expose les Minoirs à la galerie Françoise Palluel à Paris, rue Quincampoix.

« L’éthique de Denis Godefroy se fonde sur un triple renoncement : renoncement à la couleur qui est sensualité, au trait dont les accents sont l’expression d’une sensibilité individuelle que la démarche ascétique entend maîtriser, à la figuration puisque l’apparence n’est qu’un masque plaqué sur la « vraie réalité » laquelle seule mérite attention. Nous passons là de l’art à l’art de vivre. À un art de vivre de peu. En remontant encore dans le temps, c’est l’éthique des moines de Citeaux (XIIe siècle) qui nous est désormais de quelques secours. Godefroy cistercien ? »

Georges Duby, Soulages, Cahiers du MNAM, 1981-1983

 

1983 – 1985

Denis Godefroy est invité à l’Internationaler Kunstmarkt, Cologne (Allemagne), exposition réalisée avec le concours du ministère français de la culture dont la plaquette rassemble des textes de Gilbert Lascaux, Michel Servière et Eric Vandecasteele.

 

1984

Mariage avec Pascale Vallois.

Naissance de sa fille Yaël.

Il expose au 29e salon d’art contemporain de Montrouge qui rend hommage à Otto Dix et rassemble 350 artistes. Le catalogue s’enrichit d’une quarantaine de photographies des peintres les plus représentatifs sur le plan national et international. Cette même année, Denis Godefroy expose ses Nouvelles vagues à la galerie Françoise Palluel, Paris, à la galerie Déclinaisons de Rouen, à la Grande Serre à Rouen (avec une ouverture musicale de Karl Biscuit).

Nouvelle collaboration de la galerie Déclinaisons avec le musée des Beaux-Arts de Rouen pour l’exposition « Photographie contemporaine ».

 

1985

Ouverture des ateliers du 317, route de Darnétal à Rouen, que Denis Godefroy partage avec le peintre Jean-Pierre Bourquin et le sculpteur Guy Chaplin.

Il est invité par Françoise Palluel à la FIAC. Le FRAC, qui a acquis une toile de Denis Godefroy en 1983, organise une exposition « Un certain paysage » avec le château-musée de Dieppe dont Pierre Bazin est le conservateur. Cette exposition rassemble une sélection des collections permanentes du FRAC de Haute Normandie et du château-musée de Dieppe. Parmi les autres peintres, Jean-Pierre Bourquin, Olivier Debré, Christian Sorg, Pierre Tal Coat et Roger Tolmer.

En octobre, au Centre Marc Sangnier, le peintre partage une expérience musicale avec le musicien de jazz Steve Lacy et la chanteuse Irène Aebi en exécutant une œuvre le temps d’un concert.

Denis Godefroy présente ses œuvres à Marianne Requenna et Jean-Pierre Bourquin au château d’Aveny, en Normandie, espace d’art contemporain, sorte de rétrospective dont il reste des traces photographiques signées Jean-Claude Bellegou. Françoise Palluel expose des œuvres intermédiaires entre les Vagues et Nuits d’ébauche.

 

1986

Exposition chez Simone Lhermitte, rue Bras-de-Fer à Rouen, où sont présentées ses deux grandes toiles, Nuits d’ébauche et une série de croquis, d’esquisses et de peintures sur des papiers de petit format.

Il participe également à la FIAC et au salon d’Art contemporain de Montrouge et participe au premier festival d’Art contemporain de Sète.

Denis Godefroy expose Petits dessins impromptus à la librairie l’Armitière de Rouen. Cette même année, il participe avec l’organiste Louis Thiry, à un concert-performance, « L’art de la fugue en peinture », en l’église Saint Taurin d’Évreux.

 

1987

Naissance de sa fille Solène.

Un ouvrage intitulé « Nuits d’ébauche » retrace un bilan de dix années de production avec des textes de Robert Carmyne et Jean-Claude Thévenin.

« Godefroy réussit la gageure de nous montrer que le noir peut être à l’instar du diaphane traditionnel, son médium de l’apparence colorée et paradoxalement le milieu transparent où les apparences apparaissent. C’est l’œuvre au noir… ».

Jean-Claude Thévenin

 

« Nuits d’encre et Nuits d’ébauche » : cette série de « Nuits » est faite de variations de noirs, de gris, de mats profonds, mélanges de matières ténébreuses encrassées de graphite et de plomb qu’il applique au pinceau, au tampon, à la main et qui forment un ciel opaque traversé d’éclaircies bleues, ocres, blanches. »

Robert Carmyne.

 

1988

Le FRAC de Haute-Normandie présente l’exposition « Un certain paysage » au Danemark, à Holte et à Randers, où les œuvres de Denis Godefroy côtoient celles de Jean-Pierre Schneider, Joan Mitchell, Christian Sorg, Pierre Talcoat, Olivier Debré…

Il est toujours présent à la FIAC avec la galerie Françoise Palluel.

 

Denis Godefroy perd sa fille Solène.

Il travaille toute une série de plexiglas et de marbres qu’il présente dans la salle des Procureurs du Palais de Justice de Rouen. L’exposition « EPOKE » rassemble Jean-Claude Pinchon, Lionel Godart et Jean-Pierre Bourquin.

Chaque artiste ayant carte blanche, Denis Godefroy choisit d’inviter Andriana Cavalletti qui écrit en introduction au catalogue « L’équilibre entre le charnel et le spirituel est ce qui m’intéresse ».

« Si j’utilise le plexiglas ce n’est pas pour les effets de matière, mais pour le travail sur les couches et les transparences. Le plexiglas fonctionne comme une couche métaphysique ». D.G.

 

1989

« Morceaux choisis » organisé par le FRAC présente une sélection des acquisitions 1983-1988 à Rouen. Dans cette sélection figurent, avec Denis Godefroy, Jacques Mayeux, Edouard Pignon, Guy Chaplain, Vincent Barré, Joël Kermarrec, Alain Lambilliotte… Revenant à ses préoccupations littéraires et musicales il adapte l’essai de Gregory Corso « Elegiac feelings American » (éd.Christian Bourgois – 1977).

            « À regarder Le Carpaccio…

            À regarder toute cette mort chevalière immobile et stratifiée

J’irai sous tes galops, c’est sans doute le tumulte désespéré d’une joute chevaleresque, de la lumière, du noir, de l’écrit et du chant ».

Ce spectacle qui rassemble, outre le peintre, un musicien, Jeff Richard, une danseuse, Gisèle Gréau, un comédien, Maxime Leroux, est produit par le Centre d’Art d’Essai et de Création Marc Sangnier, à Mont-Saint-Aignan…

Il est suivi d’une exposition « J’irai sous tes galops » à Paris, à la galerie Françoise Palluel.

 

1990

Mariage avec Élisa Picot.

« Vague à l’arbre », au château-musée de Dieppe : exposition rétrospective des dessins de paysage du peintre et des performances Nuits d’ébauche (1985) et J’irai sous tes galops (1989).

« Mon travail est d’organiser le chaos. Le paysage n’est que la nature organisée. Imaginez un arbre qui se détache d’un ciel. En peinture il y a deux solutions : soit vous privilégiez l’arbre, soit le ciel. Mon travail consiste à remplir le vide et vider le plein. » D.G.

 

La Nature, la Vie, l’Amour, la Mort… préciser serait réducteur : Tout ce qui est ressenti, compris, supporté, vécu, aimé, souffert, l’artiste avec autant de pudeur que d’orgueil, va le voir projeté en dehors de lui-même à cause d’un certain rapport de formes et de forces. Projet, dessein, dessin. ».

Pierre Bazin

 

1991

C’est une année riche en expositions et événements. Parution d’une monographie aux Éditions Médiane dirigées par Jean-Marie Tiercelin, cosignée par Gilbert Lascaux, Philippe Bataille et Guy Lauzun.

« À l’époque, il faisait du noir une couleur et de cette couleur un sacrifice. Aujourd’hui, de sa pêche miraculeuse et à force d’ascèse, il a ramené d’autres signes, d’autres empreintes, et d’autres métaux. Après avoir démontré le noir, il a retrouvé les or de Sienne, les rouges et les bleus primordiaux. C’est une peinture sur fond de puissance sauvage, émouvante comme les alignements de Carnac ou les Orants d’il y a dix siècles. »

Philippe Bataille ; Ombilic des Gaules un monographie, Éd.Médiane.

 

Accrochages à la galerie Anne Bourdier à Rouen et chez Françoise Palluel et Tadeuz Koralevski, à Paris. Il participe également au Salon « Découverte » au Grand Palais.

« Je pars toujours du dessin, c’est là qu’on est en péril le plus radicalement possible. C’est là que la main acquiert une mémoire : il n’y a pas que l’écrit qui en ait une.

La peinture est un acte, je tente d’être en adéquation de sincérité avec ce que je n’arrive pas à trouver. C’est comme le pot de l’artisan : la surface est faite pour ce que le pot contiendra. La peinture c’est pareil : j’appelle cela l’implicite, l’implicite que je n’aimerais pas voir trop vite défloré. Il faut qu’il reste une part d’insondable dans la peinture ».

D.G., 1991. Extrait d’un entretien avec Roger Balavoine.

Au 2e Salon d’Art Contemporain de Rouen, Denis Godefroy est présent dans « Portrait d’une collection » qui réunit des toiles d’un collectionneur anonyme : Picasso, Poliakoff, Dubuffet, Gleize, Debré, Pincemin, Schneider, Combaz, priser, Pinchon…

Il expose Kalejdoskop Zaprasza avec l’Association Aestetica Nova, galerie Miejska Lodz (Pologne) et participe à « Des artistes pour la liberté », organisée par Amnesty International Rouen.

 

1992

Naissance de son fils Louis.

Dans le prolongement du salon « Découverte 1991 », Tadeuz Koralewski présente une exposition collective, « Préludes » Les dessins sont à l’honneur. Parallèlement, la galerie Lise et Henri de Menton, 4, rue du Perche à Paris propose une dizaine de Boucliers. Des œuvres de cette même série avaient été exposées auparavant au Salon de Rouen (Prix du Conseil Régional) et par Yves Richard, à la galerie de l’Orangerie de Grand-Couronne.

« Godefroy est une brute parfois tendre : quand il fait subir les pires avanies aux supports qu’il utilise, il ne peut s’empêcher de panser leurs plaies d’un trait délicat ou d’une pâte pleine et nourrie au graphite. Les dessins et la dizaine de « Boucliers », papiers marouflés et toiles, qu’il montre aujourd’hui confirment un sacré tempérament révélé il y a près de dix ans par sa superbe série « Minoirs ». »

Sélection, journal Le Monde, 31 décembre 1992.

 

1993

Denis Godefroy garde toujours en mémoire ce que son père lui a transmis. Il expose avec lui, dessins et aquarelles, « De part et d’autre » à la galerie Dubosc à Louviers. Le peintre entame une nouvelle série Les Sémaphores, carrés bleus, « des tableaux pour faire signe ». D.G.

Il montre ses œuvres au château de Belbeuf appartenant à AXA, exposition organisée au bénéfice du Comité Départemental de la Ligue contre le Cancer. Il est toujours présent à la FIAC, avec la galerie Françoise Palluel.

 

1994

Denis Godefroy accompagné de son frère Gene Clarksville et de Sébastien Souchois se produit dans un spectacle toujours inspiré par les textes de Gregory Corso au Centre Marc Sangnier de Mont-Saint-Aignan.

La galerie Duchamp, dirigée par Thierry Heynen à Yvetôt, présente deux concerts performances, deux œuvres peintes par Denis Godefroy sur une musique du compositeur Jean-Yves bosseur avec Jacques Feuillie est à la basse et Emmanuel Thiry à la contrebasse.

« Il y a de la musique dans la littérature, il y a aussi de la peinture dans la littérature et sans doute de la vision dans la musique… C’est le mélange des trois choses extrêmement fabuleuses qui fait que… ça fabrique de l’art »

 

Il participe à un autre concert organisé en collaboration avec la FNAC : trois groupes, trois plasticiens à l’Exo 7, Petit-Quevilly. Bergit von Keller est au violoncelle et Bob Drewry à la contrebasse.

« Un peintre entend-il de la musique lorsqu’il peint, un musicien a-t-il des images lorsqu’il compose ? »

« Dans l’art, tout est affaire de ponctuation… l’important dans une performance n’est pas le produit fini mais le cheminement qui y conduit ». D.G.

Encore de la musique avec « Concert pictural » à Château Cadillac en Fronsadais, invité par Jean-Jacques Lesgourgues, son collectionneur le plus fidèle. Gene Clarksville et Sébastien Souchois l’accompagnent. L’œuvre Crucifixion, désormais marouflée sur toile, est aujourd’hui au château.

Il expose « Passé présent, futur » à la galerie Françoise Palluel.

La galerie Du Bellay à Mont-Saint-Aignan l’expose dans « Bleu nuit, nuit bleue » avec Serge Périchon photographe et Dominique Denry sculpteur.

« L’idée est de capter le vol des anges. Il y a longtemps que je rêve de cette rencontre… ». D.G.

 

À l’initiative du SIVOM, une commande lui est passée pour le Métro-bus de Rouen, station « Théâtre des Arts » : deux panneaux Les Angéliques.

« Le débat entre abstraction et figuration m’énerve tellement qu’il s’apparente pour moi à la quête du sexe des anges. Cela doit être pour cela que cela s’appelle « Les Angéliques ». De plus, ce sont des plantes amères lorsqu’elles sont fraîches et sucrées lorsqu’elles sont confites ». D.G.

 

1995

Le Salon de Rouen et de Normandie, édition 1995, organisé avec la participation du Conseil Général de la Seine-Maritime, l’accueille à la Halle aux Toiles.

La galerie Françoise Palluel présente Les Angéliques, œuvres sur papier et petits formats, avec Pincemin, Bourquin, Schling, Bosser, Soulié et Taboada… Il est présent à Toulouse dans l’exposition « Regard d’un collectionneur ».

Jean-Marie Gille et Éric de Falco créent avec le peintre un café de philosophie à Bonsecours.

 

1996

Deux expositions : Les Angéliques au Cloître des Pénitents à Rouen où il réalise une performance avec son frère Gene Clarksville ; œuvres récentes à la galerie Françoise Palluel, Paris.

Le château-musée de Dieppe organise autour du dépôt du fonds régional d’art contemporain, une exposition intitulée « Terres, ciels et toujours la mer ».

Elles sont suivies d’une exposition chez Françoise Palluel, intitulée « Papiers en liberté » à Petit-Couronne, il est accueilli avec Jean-Pierre Bourquin, Francis Caudron, Jean-Claude Pinchon, Ronel, et Tran Van Rinh, dans le cadre des « Aspect de la peinture contemporaine ».

Denis Godefroy partageait avec Jean-Pierre Bourquin et Guy Chaplin, un atelier situé au bord du Robec, route de Darnétal à Rouen. En avril 1995, un courrier lui annonce que les locaux devront être libérés des biens et des personnes le 30 avril au plus tard. « Ma colère, c’est la beauté du site et l’absurdité de la situation » s’exclame Godefroy qui refuse de quitter les lieux.

« J’ai plein d’élèves et si ce lieu disparaît, fini pour eux. Je suis également investi dans un travail thérapeutique, psychiatrique avec la peinture à support. Je prends aussi des gamins… Si cet endroit croule je ne serai pas la première victime. Ces ateliers sont la mémoire d’une civilisation industrielle disparue. » D.G.

 

1997

Denis Godefroy meurt d’une rupture d’anévrisme le 24 janvier 1997.

 

 

« Denis Godefroy (1949-1997) », France, Somogy Éditions d’Art, 2003, p.183-189.